30 juin 2008

Syllogisme

Pensé à ça en zappant sur des images du concert pour la Terre à Reykjavik de la Gudmundsdottir, sur Euronews :
Björk est une artiste complète, qui contrôle tout ce qui concerne son expression.

Mais même ses fans les plus endurcis, pour peu qu'on les cuisine un peu, conviennent que pour se saper, la Castafiore épate-bobos a quand même un sacré gout de chiotte.

Par conséquent, il n'y a aucune raison que les autres aspects de son art ne soient pas aussi atroces. A commencer par sa musique, CQFD.

Des questions ?

24 juin 2008

Absolute beginner


Temporairement (je l'espère) brouillé avec la musique, qui ne parvient pas ces temps-ci à me titiller sérieusement la glande à plaisir, je suis ravi de pouvoir me tourner vers des domaines vierges pour moi, avec la naïveté et l'enthousiasme du débutant.

N'ayant jamais eu de PC (oui, je suis un snob du Mac) ni de console de jeu jusqu'à l'automne, j'en étais pratiquement resté à Tetris. Et puis, la Wii est entrée dans ma vie. Je laisse les gamers sérieux en rigoler, je m'en fiche, pour moi le mal est fait. Insidieux. Au début, un peu de Wii Sport entre amis. Puis Mario Party 8. Et Rayman et les lapins encore plus crétins, suivis des juste crétins. Sans oublier Guitar Hero, pour bourriner gaiement - les cheveux longs, c'est une attitude. Et la Wii Fit, sans laquelle je n'envisage plus de commencer la journée, pour une petite séance de mise en forme. Si le yoga n'est pas trop ma tasse de thé (je suis raide comme la justice, avec des muscles de laiton), je m'éclate bien à la boxe, et même au step. Et j'adore le côté tout nippon de la chose : la petite balance, charmante, vous parle, vous avez un magnifique déguisement de pingouin (un vrai, pas un tux) pour choper les poissons sur la banquise, et au jeu de foot où l'on soigne son jeu de tête, s'il ne faut pas rater le ballon, il faut en revanche éviter les godasses (normal), et surtout les têtes de panda (?!?!) qui vous sont balancées

Mais tout cela n'était rien par rapport à Mario Kart Wii. Je ne suis pas doué, mais ce n'est pas grave. Je m'éclate. Et je bûche. Je potasse les vidéos sur YouTube qui montrent où sont les raccourcis - les basiques et ceux qui nécessitent une cueillette de champignons sous peine de se montrer pénalisants, et même ceux réservés aux experts du dérapage super turbo dont je suis encore loin de faire partie.

Grâce aux sites spécialisés, je sais au moins ce qu'il faut faire pour débloquer personnages et véhicules, et j'en ai déjà quelques-uns à mon palmarès. Et je ne suis pas peu fier que mon Mii pose entre Mario et Daisy sur l'écran de récompense que j'ai pu sauvegarder. Uniquement sur la console, hélas, je n'ai pas encore trouvé le moyen, hormis une bête photo d'écran, de le faire passer sur les Interwebs. Mais bon, assez raconté ma vie pour aujourd'hui, j'ai du boulot. Qui va aller débloquer Skelerex, je vous le demande ?

20 juin 2008

Où y a Eugène...

Bizarrement, l'un des derniers milieux où l'eugénisme est encouragé, mieux, revendiqué, outre celui des nostalgiques du IIIe Reich, est celui des collectionneurs d'enregistrements pirates. Pas question pour eux de s'échanger autre chose que des fichiers flac (un format de compression non destructeur) de première génération, avec marqueurs génétiques et pedigree détaillé exigés, captés sur DAT (le Min-Disc n'est pas assez bon pou eux). Sinon, le risque est terrible - et insupportable de - je cite, “polluer le patrimoine génétique” (sic). Sonore, s'entend.
Le plus drôle, bien sûr, étant qu'un nombre non négligeable de ces enregistrements captés dans les règles l'art est quand même rigoureusement inaudible, pour toutes sortes de raisons (jam band testant la résistance de son auditoire, sono pourrie, spectateurs bavards à proximité)...

19 juin 2008

Coup de chance

Comme je le racontais la dernière fois, un des premiers albums que j’ai failli acheter était A Question Of Balance des Moody Blues. Je l’ai échappé belle ! Car si, en 68-69, les Anglais ont connu une sorte d’état de grâce, il s’est aussitôt dissipé. Justifiant les quolibets qui les ont accablés (non, je n’ai quand même pas poussé le vice jusqu’à jeter une oreille aux albums post-reformation, avec mullets et résidences à Las Vegas à la clé).

Histoire de me rincer les oreilles, et de me mettre en bouche avant leur double CD live annoncé pour août, Remember, j’ai profité de ce qu’un homme de bien avait posté la prestation des Fiery Funaces à Bonnaroo, le week-end dernier, pour me délecter encore une fois de la façon qu’ont les Brooklyno-Chicagoans de réinventer leur répertoire.
Pour ces dernières dates avant les vacances, ils ont eu la double bonne idée de mettre entre les pattes de Jason Loewenstein, fraîchement rentré d’un périple européen avec Sebadoh, une guitare plutôt qu’une basse, et d’inviter leur amie Annabelle Cazes, alias Glockabelle. Qui, comme son surnom l’indique, est une allumée du glockenspiel, dont elle joue avec un dé à coudre à chaque doigt (sauf le pouce) – quand, en guise d’intro à “Navy Nurse”, elle n’expédie pas la “Marche Turque” sur un mini Casio !


Infatigables, les Friedberger ont assuré dans la foulée un deuxième set totalement différent, paraît-il, sans Annabelle mais à deux guitares, l’alimentation des claviers de Matt étant déglinguée. Hélas, sans trace apparente sur les Interwebs…

Si vous avez envie de savoir comment les Fiery Furnaces avaient remplacé Jason, c’est encore une fois vers nyctaper qu’il faut se tourner, avec un show capturé en avril à Brooklyn. Et c’est assez savoureux. Plutôt intrigante sur le papier, leur collaboration avec Kyle Hollingsworth, clavier du jam band String Cheese Incident, a tenu ses promesses, dans un genre plus déconnant que prog (ouf !), avec pas mal de vieilles chansons dépoussiérées au menu.

Bref, tout cela me donne une furieuse envie de découvrir Remember. Qui, comme il se doit, ne sera pas un live “normal”, mais mélangera des chansons (ou fragments) extraits de concerts de différentes périodes. Déconstruction, quand tu nous tiens…

Quant au prochain disque studio, après vote des fans, il s’agira d’un album funky, dont les paroles seront inspirées par des tranches de vie de ces mêmes fans, brièvement résumées sur des feuilles remises à Matt à l’issue des concerts. La routine, en somme, pour un groupe de rock moyen…

Et pour en rester dans mes obsessions, Skeletal Lamping, le prochain of Montreal, conçu selon Kevin Barnes pour déjouer les attentes de l’auditeur, est attendu pour octobre, concert à l’Elysée-Montmartre le 15 en prime. Une visite tous les six mois, c’est une bonne moyenne, merci à eux.

13 juin 2008

Révisionnisme

Ce coup-ci, ça y est, c’est officiel : je suis atteint par l’andropause. À moins que ce ne soit la crise des cinquante ans.

Symptômes : pendant quelques jours, j’ai été persuadé que, tout bien considéré, Tokio Hotel était la réincarnation des New York Dolls. Non, je plaisante. En fait, je n’avais plus envie d’écouter de la musique. Rien. Peanuts. Mauvais signe, ça. Surtout que je n’avais pas vraiment envie de grand-chose d’autre non plus, à part jouer à Mario Kart sur la Wii.

Et puis, c’est passé. Mais c’est peut-être pire. Au lieu d’écouter d’excellents disques actuels dûment estampillés tels par les autorités compétentes (Philippe Dumez, la Blogothèque, Pitchfork, Télérama, heu, là, je m’égare), et que j’aime vraiment, comme le Bon Iver, voilà que je me tourne vers un groupe unanimement méprisé. Et que j’y retourne.

Jusqu’ici, d’ailleurs, je n’avais jamais – ou presque – prêté la moindre attention aux, ahem, Moody Blues. Puisque c’est d’eux qu’il s’agit. Le presque, c’est juste parce que, à 13 ans, un des premiers albums que j’ai failli acquérir était A Question Of Balance (j’aimais bien “Melancholy Man” qui passait sur Europe 1, façon plaisir coupable, parce que même si je n’en étais qu’à mes premiers émois rock, j’étais bien conscient du côté cruchon et fadasse de l’œuvrette. Nul n’est parfait). Il fallait bien passer une commande par trimestre sur le catalogue France Loisirs qui venait de se lancer. Mais c’est Led Zeppelin III qui l’emporta. Avec une pochette simple toute pourrie. Et sa deuxième face acoustique que je n’aimais pas, alors, pour cause d’allergie primaire – soignée depuis, merci – à la guitare en bois.

Mais bon, je l’avais échappé belle. Comme l’année d’après, en Écosse, où j’ai failli acheter Colosseum Live, alléché par sa sensationnelle pochette intérieure antistatique et dépoussiérante. Non, je n’invente pas. Coup de bol, il n’y en avait plus d’exemplaire. Ce qui m’évita de me retrouver avec une sombre daubasse de prog-rock jazzy, brâmée par l’insupportable collectionneur d’insignes nazis Chris Farlowe, que même alors j’avais du mal à supporter (c’était plutôt leur saxo dégarni qui m’impressionnait, et que je verrai des années plus tard accompagner, avec le premier guitariste de Thin Lizzy, un Bo Diddley – RIP – en sous-pull, ses bagages s’étant égarés !). Pour qui suivrait encore après toutes ces digressions, c’est l’Untitled des Byrds (deux disques pour le prix d’un, yeah !) qui remplaça avantageusement le Colosseum. Et fit de moi un gaga des Oyseaux pour la vie.

Sinon, jusqu’au mois de mai, je n’avais entendu, forcément, que le dégoulinant “Nights In White Satin” (moins bien que “A Whiter Shade Of Pale”, catégorie pour-emballer-dans-les-boums-même-si-on-est-un-grand-timide), et son pendant long jeu Days Of Future Passed, affreuse meringue chantilly noyée dans des intermèdes mélasses philharmoniques façon (très mauvaise) comédie musicale, que se plaisait parfois à dégainer – en 77 ! – un pote pervers polymorphe.

Comme dirait Johnny s’attaquant au Hamlet du Barde qui ne lui avait pourtant rien fait, je ne sais pas trop ce qui m’a poussé à m’égarer sur ce terrain peu fait pour m’attirer. Un vague soupçon que, peut-être, les Moodys de la fin des années 60 relèveraient autant du psychédélisme anglais dit de nursery que du prog-rock. Soupçon plus qu’avéré…


Ride My See Saw (live on TV au... Kremlin-Bicêtre, 1969)

Formés, comme tout le monde, à l’école du R&B (au sens anglais sixties, blues Chess et soul), les Brummies, comme tout le monde, se sont engouffrés dans le créneau psyché, après un temps d’hésitation. Mais avec un sérieux peu commun. Et une propension à tomber dans tous les panneaux qui réclame une certaine abnégation pour passer outre les défauts criants qui leur valent une réputation critique désastreuse.

Oui, ils sont banals à pleurer – le premier des groupes anonymes. Leurs pochettes sont unanimement laides à faire avorter une couvée de singes. Ah, et elles emballent de préférence des concept-albums, moins prétentieux d’ailleurs que désespérement naïfs. Le pompon étant atteint par les poèmes - heureusement brefs - que s’entête à déclamer Graeme Edge. Des poèmes de batteur, tout juste - pas vraiment pires que ceux d’Hawkwind, pour être honnête, mais ce n’est pas une raison. Et puis, pas de leader évident ou de point focal sur scène, ce qui renforce leur côté anonyme. Tout le monde compose, joue et chante, à égalité. Mais sans qu’il soit évident de distinguer qui écrit quoi, si on ne lit pas les crédits. D’autant que le club des cinq partage un certain goût pour le romantisme cucul.

Seulement, voilà, le revers a une sacrée médaille. Le temps, au moins, d’In Search Of The Lost Chord, On The Threshold Of A Dream, et To Our Children’s Children’s Children, les Moody Blues ont su avoir les qualités de leurs défauts. (Jusqu’à un certain point. Rien que de lire les titres donne envie de rire et/ou de fuir, et rien ne peut justifier les pochettes.) Il est difficile de nier qu’ils aient compté parmi les mélodistes les plus inspirés d’une époque où les concurrents étaient les Zombies d’Odessey & Oracle ou les Kinks de Village Green Preservation Society, avec des arrangements touchant parfois au génie de Forever Changes, et des harmonies vocales transcendantes qui compensent largement le manque de caractère de chacun. De l’avantage d’avoir une multitude de songwriters baignant dans une saine émulation plutôt que cherchant à tirer la couverture à eux. Et, sans être individuellement des instrumentistes surdoués, ce qui évite heureusement tout le côté démonstration technique éreintant du prog, leur somme dépasse largement le total des individualités. Avec des mentions spéciales, toutefois, à Justin Hayward, guitariste capables d’envolées nerveuses inattendues, et à Mike Pinder, grand gourou du Mellotron, le clavier le plus caractériel qui soit.

Bon, pas question de s’emballer non plus. Mais dans la catégorie des groupes mineurs, les Moody Blues ont été carrément plaisants à l'oreille (ah, tous les zigouigouis en stéréo). Bien plus réguliers que les Move, par exemple, leurs très inégaux collègues de Birmingham en perpétuelle quête d’identité, pourtant régulièrement réévalués. Ou, dans un genre, assez similaire, le Pink Floyd post-barrettien, bien en peine de pouvoir s’aligner question songwriting.

Mine de rien, les gaillards ont écrit (sans s'en douter) la plus parfaite B.O. qu'on puisse rêver pour une pub de banque rétro-baba, quarante ans plus tard, ultime compliment ou insulte.

Reste qu’une fois affalé, les orteils en éventail et le sourire aux lèvres, dans l’édredon sonore moelleux, euphorisant et suprêmement confortable des Moodys, on en arriverait à trouver moins ridicule leurs concepts, et à atteindre l’“Om” mind...

5 juin 2008

Guitar hero

En apparence, Stephen Malkmus n'a pas changé. Il affichait hier soir à la Maroquinerie son éternelle allure de grand dadais, casquette enfoncée sur les yeux et allure mi-provocante, mi-empruntée, le corps (offert de préférence de profil) en déséquilibre.

Le déséquilibre, ou plutôt l'équilibre fragile et toujours menacé, c'est aussi évidemment la caractéristique de la musique du bonhomme depuis les débuts de Pavement. Mais, tout bien considéré, je ne suis pas certain que la voie qui s'affirme au fil de sa trajectoire solo soit forcément la plus gratifiante pour le fan.

Et là, il me faut manger mon chapeau. Je me suis enthousiasmé aveuglément pour Real Emotional Trash, le dernier CD de SM et ses Jicks... avant de m'en lasser rapidement. Pas assez de chansons mémorables, trop de solos impressionnants le temps de quelques écoutes, mais sans mystères.

Et en concert, c'est un peu la même chose. Bien soutenu par les Jicks, SM est irréprochable, mais… bavard. Et ses longs morceaux, pourtant rythmés par des montées, accélérations et décélérations, finissent par se ressembler. Au risque de donner un bon concert, mais un peu linéaire, où l'on a l'impression qu'il ne se passe pas tant de choses. Peut-être, tout simplement, parce que Malkmus est un excellent guitariste, mais pas un guitariste magique.

Heureusement, le rappel sera agrémenté, pour le fun, d'un “Alright Alright Alright” (soit la reprise du "Et moi, et moi, et moi” de Dutronc via Mungo Jerry) où tout le monde se lâche vraiment, sur scène comme dans le public.

Reste comme une impression de s'être finalement davantage amusé avec les chansons délirantes et/ou autobiographiques du toujours excellent Jeffrey Lewis, en première partie (accompagné comme il se doit par son frangin Jack et Yaya Herman Düne).

Et l'idée qu'à tout prendre, la reformation de Pavement, qui semble s'annoncer pour 2009, ne serait pas si idiote…