25 juin 2009

Canal moins

La meilleure émission de télé française est à l'antenne depuis quelques mois. Et personne ne s'en est aperçu. Bizarre, non ?

Faut dire qu'elle passe sur Jimmy. Et qu'il en va des chaînes comme des labels. Qui parfois naissent de l'initiative de passionnés, vous font découvrir des tas de trucs, et finissent comme des coquilles vides, sucées jusqu'au sang.

Tel est le cas de Canal Jimmy, pionnière du câble et du satellite, née dans l'ellipse de Canal+. Ses initiateurs ? Michel Thoulouze et Pierre Lescure, fins téléphiles, qui ont vite fait de passer de l'orientation culto-nostalgique des origines (Jimmy, en hommage aux chers défunts Dean et Hendrix) à une optique culto-défricheuse. Outre des magazines sympathiques, l'antenne est vite peuplée de séries. En VO, au moins pour certaines diffusions. Et triées sur le volet. Des titres ? Dream On, Bottom, Father Ted, Ab Fab (que Canal+ avait tout salopé en VF), Seinfeld, NYPD Blue. Toute la galaxie Star Trek. Et puis Friends (avant qu'on en bouffe à toutes les sauces), les Sopranos, The Shield. Entre autres.

Avant l'essor du DVD, avant le Divx et l'Internet haut débit, Canal Jimmy a très largement créé ce que l'on peut appeler la culture séries en France (avec son magazine dédié, animé par Alain Carrazé). Ce qui causera sa perte. L'intérêt croissant du public pour les séries, devenus un enjeu stratégique, tire les prix vers le haut, et Canal+ va cannibaliser son enfant prodige. Jimmy tout court, à partir de 2003, n'est plus guère qu'un vulgaire robinet à séries usées jusqu'à la trame, sans même profiter de la VM la plupart du temps.

Ou presque. Car, je me répète, c'est bien sur Jimmy qu'est diffusée, depuis quelques mois, la meilleure émission de télé française actuelle.

Avant, Watcha, c'était ça.

Beurk.

Mais sur Jimmy, maintenant, Watcha, c'est ça.

Oui, mais encore ? Ben, heu, le magazine des privilège et des privilégiés, comme ils disent. Mais aussi des tendances (la preuve, le générique est signé Ariel Wizman). Du futile, donc. Avec des sujets, par exemple, sur les yachts, les dernières avancées du fitness, les services de conciergerie, les sneakers addicts, le street golf. L'indispensable Watcha/Pas Watcha, match entre deux pipoles arbitré par des journalistes spécialisés, genre BHL contre Barbara Cartland, écrivains lookés. .

Pas de quoi twitter à sa mère ? Si. Parce que ce mag est redoutablement peaufiné. Sujets montés au cordeau, nerveux, et surtout mis en perspective par une voix off omniprésente, pertinente et persiffleuse. Qui transforme ce prétendu hymne au superficiel et au bling en critique mordante de la société du paraître. En épargnant juste le talent des vrais artisans et esthètes. Parce qu'ils ne faut pas mélanger les torchons et les serviettes.

Le plus étonnant est que la voix en question appartient à Juliette Arnaud, ex-compagne de Michaël Youn, co-scénariste de La Beuze (ouch) et ci-devant présentatrice d'Intervilles avec Nagui. Je sais, ça peut faire peur.
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Pour se faire une idée, mieux vaut éviter de chercher la bande-annonce sur le Net (très ratée). Et s'infuser d'emblée une émission entière.

Conquis ? Pour les programmes, c'est par ici. Et ça a l'air parti pour continuer cet été. Les vacances avec les bataillons de congés payés, c'est définitivement pas Watcha.

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